Headoniste, la nouvelle marque de casquettes premium Made in France

Véronique Boute, ancienne professionnelle enseignante de la formation Responsable du développement de produit textile chez Albert de Mun, vient de créer sa marque de casquettes haut de gamme Headoniste. A travers cette interview, elle nous raconte son parcours, nous livre les secrets de sa reconversion et nous parle de sa marque.


Bonjour Véronique. Pouvez-vous vous présenter et nous expliquer votre parcours avant Headoniste ?

Je ne suis pas issue du monde du textile. A la base je travaillais pour la lunetterie. Je suis entrée dans le monde du textile en travaillant pour des sociétés qui faisaient du grand import et de l’objet promotionnel et j’ai commencé à développer des textiles, des trousses, des peignoirs, du linge de maison avec l’Asie. C’est comme ça que j’ai glissé doucement vers l’industrie textile et que j’ai travaillé ensuite pour du prêt-à-porter pour l’enfant, la grande taille homme et femme. J’ai ensuite créé ma propre marque, Marie Mélodie, que j’ai gardée 3 ans. Il s’agissait d’une marque de tricot pour personnes de grande taille. Il y a 15 ans, les personnes de grande taille payaient plus cher que les personnes de petite taille. Je trouvais cela très injuste et j’ai décidé de créer une marque qui montait en taille avec un prix égal. L’arrivée de ma fille et les difficultés de retour sur investissement m’ont contraint d’arrêter. Je suis entrée ensuite aux Galeries Lafayette où je m’occupais de tout le cachemire femme. J’ai bifurqué sur Version Originale et Jodhpur et participé à la création de la marque Galeries Lafayette (regroupement des collections Avant-Première, Version Originale, Briefing et Galeries Lafayette Paris). Après cela je suis partie chez Burton of London où j’étais Cheffe de groupe puis Directrice de collection. En parallèle, j’ai enseigné chez Albert de Mun où je donnais des cours de marketing, achats/logistique, anglais technique, Illustrator/Photoshop.

Vous avez créé la marque Headoniste pendant l’été dernier. Pourquoi ce choix ?

Je ne suis pas seule à avoir créé Headoniste. Cela faisait 1 an que nous en parlions avec mon partenaire. Lors d’un diner entre amis, un ami proche grand amateur de casquettes, qui en achète énormément, nous raconte qu’il ne trouve pas en France de casquette avec la vraie forme baseball, forme iconique américaine. Il voulait une casquette en laine/cachemire. Il a parcouru tout Manhattan pour en trouver une sans succès. De notre côté, nous avions envie de monter un projet sur du Made in France, par conviction et par choix, et on s’est dit que ce n’était pas possible de ne pas trouver en France, pays de la chapellerie, de fabricant de casquettes haut de gamme avec des belles matières. Le projet est parti de là. On a mis une année pour le murir parce que j’étais en poste à l’époque, donc pas trop de temps dédié, puis je m’y suis mise à 100% après avoir mis fin à ma collaboration avec Burton. J’ai sourcé des belles matières, j’ai trouvé un fabricant et on a eu envie de proposer la casquette baseball mais façon très urbaine, très chic, pour en faire une pièce iconique de son vestiaire en détournant son côté très sport, casual et en faire un accessoire urbain chic.

Headoniste est une marque de casquette haut de gamme. Pourquoi ce choix de produit ?

Je ne porte pas la casquette mais des chapeaux, bonnets, tous ces accessoires de tête. J’ai vraiment voulu travailler les belles matières, les matières nobles. J’ai voulu sourcer les matières en France et faire des choix de mélanges de matières qu’on ne trouve pas à l’heure actuelle sur ce genre de produit. J’ai mélangé des laine/cachemire recyclés, de la suédine d’agneau avec des jacquards français de chez Deveaux. Cela donne des produits atypiques. Les matières fonctionnent très bien entre elles. Cela permet de proposer des choses différentes de ce qui existe à l’heure actuelle. Ce sont des produits qui sont à la fois classiques et à la fois très mode. Par exemple, avec un look un peu rock, la casquette laine/cachemire noire, complètement moulée, va assagir votre tenue tout en restant très moderne. Pour un look classique, les mélanges matières, la laine flockée ou la laine camouflage va donner un côté rock. Ce que j’ai eu envie de faire c’est twister ce produit-là qui à la base est un produit pur casual.

Headoniste est une marque positionnée sur le made in France. Pourquoi ce positionnement ? Quelles sont les autres valeurs de la marque ?

J’ai beaucoup travaillé dans l’industrie du textile avec de la délocalisation. Il y a de très bonnes choses quels que soient les pays et chaque pays a ses spécificités. Le Made in France dans le choix de la chapellerie, de la casquette : j’avais envie de remettre au goût du jour cet artisanat que l’on a en France. Toutes mes casquettes, du choix des matières à la fabrication du produit doivent être faites dans des ateliers qui maîtrisent le savoir-faire, maîtrisent les tissus. C’est pour cela que j’ai voulu rester dans l’hexagone. C’est aussi parce que j’ai eu envie de vrais partenariats, de faire travailler l’industrie locale. Mon façonnier est en Normandie et j’y vais régulièrement, ce qui crée des liens très forts. On cherche des solutions et on n’est pas sur des négociations de prix mais sur des négociations de savoir-faire par rapport à des tissus compliqués à travailler. A part la boucle en métal, tout provient de France et est transformé en France : contre-collage, confection, … soit un produit 99% français. Pour les casquettes qui ont un tissu italien, seul le tissu est importé mais le reste de la fabrication est entièrement français.
On est vraiment une marque engagée. Je privilégie les circuits courts, quand je peux, tout ce qui est upcycling puisque mes labels viennent de chez Neyret et sont en polyester recyclé. Les laine/cachemire viennent d’Italie et sont des laines recyclées également. Chez Deveaux on privilégie tout ce qui est industrie locale ce qui limite les émissions de CO2. Pour les cuirs, je ne lance pas la fabrication de peaux mais j’achète des peaux qui ont été fabriquées pour l’industrie du luxe et qui n’ont pas été utilisées pour diverses raisons. Je fais donc de l’upcycling quand c’est possible. Nos emballages sont recyclables : je livre dans des pochons en coton qui sont fabriqués en France. Les boîtes sont en carton, donc recyclables et sont fabriquées en Roumanie. Le ruban du tiroir de la boîte est en coton. Aujourd’hui on parle beaucoup d’écologie, d’éco-responsabilité. On est en plein dedans. Sans vouloir utiliser ces arguments à titre marketing, on préfère mettre en avant le savoir-faire et l’industrie locale. La fabrication française est pour nous une évidence. On ne le met pas forcément tout le temps en avant. Il y a juste un petit drapeau derrière. Le recyclage ça devrait être aussi une évidence.

Qu’est-ce qui vous plait dans ce nouveau métier de chef d’entreprise ?

En créant sa marque, en étant indépendant, on a la possibilité de faire des choses très vite. En 6 mois on a monté le projet, le site a été créé, nos produits sont vendus en ligne, on participe à des pop-up stores. Par exemple, on a visité une fonderie en Ardèche la semaine dernière, en 3 semaines on a créé le projet, développé avec le directeur de l’atelier le système d’aimant et les produits arrivent la semaine prochaine. Tout va beaucoup plus vite et je suis libre du choix des matières. Mon fabricant peut tester, même quand c’est compliqué. De même pour le pop-up store que je fais dans le Marais. Je les ai contactés le mercredi, on a démarré le mardi suivant. C’est très rapide. On peut également s’adapter à la situation, faire des essais et si ça ne va pas parce qu’on s’est trompé, ça ne remet pas en cause toute une équipe. Cette façon de faire permet de porter des projets, de communiquer et de vraiment maîtriser toutes les actions de A à Z. C’est cette autonomie, cette rapidité, de pouvoir faire des choix, qui permet d’aller plus vite et plus loin et qui donne une certaine fierté.
J’espère malgré tout, si on se développe bien, constituer une équipe parce que c’est beaucoup de choses. On a besoin d’être accompagnés car on ne peut pas tout faire tout seul.

Envisagez-vous de commercialiser d’autres produits par la suite ?

C’est déjà le cas. J’ai eu envie de proposer de nouveaux produits. Ce sont des pin’s aimantés à mettre sur sa casquette pour accrocher le masque. Avec la pandémie, on a voulu développer des petits produits annexes. J’ai également inventé le bijou à casquette avec cette même base de pin’s aimanté. Cette gamme de bijoux peut également se mettre sur des bonnets, des chapeaux.
On aimerait également développer d’autres formes de chapeaux. Dans les jours qui viennent on va avoir un chapeau type Borsalino en feutre de lapin, matière existante destinée à une grande maison de luxe et pas utilisée. Ces excédents de matières que j’ai trouvés, j’ai eu envie de les tester sur des chapeaux dans des coloris un peu frais. On va donc diversifier les produits Headwear.
J’aimerais aussi faire des accessoires, des gants, des écharpes. Je ne ferai pas de prêt-à-porter. On va rester sur l’accessoire, homme et femme.

Comment travaillez-vous au quotidien pour créer, développer, produire et distribuer vos modèles ?

Je fais beaucoup de benchmark, je regarde beaucoup ce qui se fait dans le luxe et dans différents pays. Je regarde comment on est positionné par rapport à des marques entrée de gamme, moyen de gamme et premium.
J’ai la chance par mes expériences passées d’avoir accès à beaucoup de fabricants de tissus que je connais. Je vais voir régulièrement ce qu’ils font, ce qu’ils vendent aux différentes marques. Ce sont surtout des fabricants qui travaillent avec des marques premium. J’ai donc vraiment les tendances de ce qui se fait sur ce secteur. Je tip les tissus qui me paraissent intéressants. Je vais aussi beaucoup dans une boutique, La Trouvaille, qui écoule les stocks de cuir des maisons de luxe. Je vais voir ce qui se fait au niveau des peaux et des couleurs. Ensuite je fais mes essais. La casquette reste classique, la forme ne change pas beaucoup. Le travail porte plus sur le mixe des matières. Je regarde si ça fonctionne. Je travaille avec les biais, les biais contrastés, je regarde si je peux faire des matières intérieur positif/négatif, … A partir de là je construis mes prototypes, je les dessine sous Illustrator avec les couleurs et les contrastes. Je lance ensuite mes 1ers prototypes chez mon fabricant. J’y vais régulièrement pour expliquer les fiches parce que c’est parfois un peu compliqué. J’y suis allée dernièrement et on a lancé une gamme enfant. On a commencé à réaliser les 1ers prototypes de l’été 21. Je regarde ce qui fonctionne et fais les modifications pour les têtes de séries.
Je fais beaucoup les boutiques, en particulier les boutiques vintages pour la future collection d’accessoires pour trouver des choses un peu différentes. Sur la collection de gants, je voudrais faire des produits un peu issus de ce qui se faisait dans les années 60/70/80.
On reste sur quelque chose d’assez simple par rapport à une collection de prêt-à-porter où on va monter un plan de collection. Là j’ai un plan de collection de 24 casquettes pour l’été prochain avec l’enfant. On en avait 10 cet hiver.

Quelles compétences vous paraissent indispensables pour créer sa marque de mode ou d’accessoires aujourd’hui ?

Il faut bien maîtriser les coûts, surtout quand on fabrique en France, parce que les prix de revient ne sont pas les mêmes que lorsqu’on délocalise. Il faut donc savoir calculer les coûts, est-ce que ça va passer en termes de prix de vente. Toute la partie calcul de prix de revient est importante à maîtriser.
La partie marketing aussi : comment choisir ses canaux de distribution, sur quel type de canal on va aller, comment on va dialoguer, comment on va positionner sa marque. Tout cela doit être bien calé en amont parce que une fois positionné et référencé, faire un virage à 180° ce n’est pas très bon.
Il faut aussi une partie créative dans la mesure où il faut pouvoir proposer des choses un peu différentes, des nouveautés, savoir twister des matières, le côté technique pour ne pas proposer à votre fabricant un produit qui techniquement n’est pas faisable ou trop difficile à réaliser sinon vous allez l’épuiser.
Il faut allier ces 3 compétences là ensemble et bien les travailler en amont : la partie création, la partie positionnement de marque – marketing et la partie calcul de prix de revient afin que votre projet soit, avant son lancement, cohérent dans son ensemble, nécessaire dans un business plan remis aux investisseurs.
Il faut se fixer une ligne de conduite et ne pas en sortir, ne pas se laisser influencer par les commentaires car on risque de partir dans différentes directions et perdre l’ADN de la marque. Ce qui est important quand on a des convictions, qu’elles sont bien notées en amont, c’est d’aller au bout de ses envies et de sa ligne de conduite, tout en restant à l’écoute.
Si on est associé, ces compétences peuvent être réparties entre les 2 associés. Quand on démarre, ce n’est pas facile d’avoir toutes ces compétences en même temps. Il faut savoir bien s’entourer mais même pour un créatif, avoir des notions de coût de revient et un peu de marketing me parait intéressant car ça permet de se projeter et de projeter sa marque.

Quelles difficultés avez-vous rencontrées dans la création de votre marque et la production de vos produits ?

C’est très difficile de trouver des façonniers qui veulent vous suivre et des tissus pour mes produits. Pour mes casquettes l’emploi matière est de 17 cm. Quand je fais 300 casquettes, cela correspond à 50 m. 50 m c’est une coupe type d’échantillonnage et aujourd’hui je n’en suis pas à ce stade. Je suis donc obligée d’acheter des tissus et de monter ma collection dans les coloris des gammes existantes. Comme derrière je ne généralise pas la commande, les fabricants ne veulent pas continuer. On est toujours obligé d’être malin et de sourcer d’autres tissus. Ce n’est pas le cas partout. Par exemple, Deveaux, qui me connait très bien, me suit. Sur du PAP vous aurez moins cette contrainte de tissus parce vous aller consommer plus. En revanche il faut ensuite trouver des façonniers qui acceptent de croire en votre projet et de fabriquer.
Ce qui est important quand vous lancez une marque, que vous soyez jeune ou moins jeune, c’est qu’on doit tout payer avant. Il faut donc avoir un peu de financement pour pouvoir le faire. Quand on démarre, les relations sont inversées, on n’est pas client et on en est presque à remercier les gens de bien vouloir accepter notre projet. Il ne faut pas baisser les bras et continuer, chercher.

Quels conseils donneriez-vous à des jeunes qui souhaiteraient créer leur marque de mode ?

Je les encourage car c’est bien de monter son projet, cela permet d’acquérir une autonomie, de bien maîtriser toutes les parties de l’industrie textile, l’amont comme l’aval. Il faut être tenace, assez organisé, créatif car il faut proposer des choses un peu différentes, analyser le marché sur lequel on va aller et bien s’entourer, bien monter son projet en amont pour éviter les mauvaises surprises au fur et à mesure. Faire tout seul, ce n’est pas évident. Nous en est 2 et parfois cela permet de se remotiver l’un l’autre, d’éviter de faire des mauvais choix, d’échanger et de trouver des solutions.
Entreprendre est lié à une personnalité. Si un jeune veut se lancer, il faut le faire, c’est bien d’aller jusqu’au bout. S’il a une bonne idée, s’il a bien monté son dossier, il faut y croire, être tenace, aller au bout de ses idées et essayer de s’entourer car être tout seul ce n’est pas évident. Il ne faut pas hésiter à s’entourer de gens qui ont de l’expérience car ces personnes peuvent donner des idées auxquelles on n’aurait pas pensé, peuvent canaliser les énergies et accompagner pour éviter certaines erreurs, être rassuré.

Pensez- vous que les connaissances techniques sont indispensables pour réussir ?

Oui quand même sauf si vous vous associez avec un binôme qui les a et de qui vous allez apprendre. Dans ce cas vos compétences se complètent. C’est malgré tout important d’avoir des compétences techniques pour éviter de faire « n’importe quoi », des choses trop farfelues. Par exemple, j’ai des compétences techniques mais pour l’une de mes casquettes mon fabricant a rencontré des difficultés car le tissu était très épais. Comme je veux la vraie casquette baseball avec la vraie coque devant, ils s’y sont repris à plusieurs fois. Pour l’hiver prochain on va faire différemment parce qu’il faut aussi faciliter le travail des façonniers leur éviter de passer des heures sur le produit. Avoir des compétences techniques ça permet d’éviter les produits à problème, les aller-retours et de fatiguer vos collaborateurs.
Pour ma part, j’ai moins de compétences sur la communication et le web. C’est mon partenaire qui s’en occupe. Comme je le vois faire au quotidien, cela me permet de faire des choses sur le site internet. J’apprends, afin d’être la plus autonome possible et en cas de problème d’arriver à les régler plus rapidement.

Pensez-vous que la mode et le textile sont des secteurs d’avenir ?

Les choses ont beaucoup changé. J’espère que les clients vont revenir à des vraies valeurs sur les produits textiles : acheter moins mais mieux. J’espère qu’on va aller sur ce mode de fonctionnement où plutôt que d’acheter 3 produits pas très chers on en achète un, un peu plus cher, mais qu’on va garder. La fast-fashion a 20 ans et je pense qu’on est arrivé au bout de ce modèle-là. La nouvelle génération est très sensible au respect de l’environnement et je pense qu’ils vont être très sensibles à cette valeur des choses. Cela permettrait de recentrer nos fabrications, ne pas surproduire pour ensuite survendre et détruire les invendus. L’industrie du luxe n’a plus le droit de détruire ses invendus. On est en train d’évoluer sur quelque chose de différent. Le mode d’achat est lui aussi différent. Les petites marques se développent sur le web. Est-ce que cela va fonctionner parce qu’il y en a vraiment beaucoup et que certaines disparaissent assez vite. En revanche, on fabrique différemment, on essaie d’être plus malin, d’utiliser des matières recyclées, des matières déjà produites, des invendus plutôt que de lancer des productions. Par exemple, je travaille avec un fabricant de cuir pour l’été prochain qui produit du nubuck. Le nubuck n’est pas utilisé dans l’industrie du luxe et du cuir parce que c’est une peau un peu plus fragile et un peu plus marquée. Il récupère toutes les parties non utilisées qu’il retravaille et personnalise avec des dessins ou des perforations ce qui donne des choses très intéressantes. C’est une revalorisation plutôt que de détruire. Je pense qu’on va plutôt arriver sur des choses comme ça, de personnalisation des matières vouées à la destruction mais qui sont des matières récupérées de l’alimentation comme les peaux d’agneau ou de veau. De même pour les cuirs de poissons que j’aimerais essayer plus tard en récupérant les peaux. C’est essayer d’avoir zéro déchet et de recycler un maximum de choses. Faire des casquettes dans des tissus en matières recyclées comme la laine, c’est faisable mais faire des casquettes dans des vêtements existants c’est plus compliqué parce que le façonnier a besoin de travailler sur la laize. Cela dépend du produit.
En ce qui concerne les « cuirs » de pomme, les « cuirs » végans, je n’y crois pas car ils sont faits en partie à partir de produits issus du pétrôle malgré tout, même si c’est recyclé, ce qui est assez polluant. Je préfère utiliser des peaux d’animaux élevés pour l’alimentation plutôt que de les détruire parce que ces peaux sont là. Je ne suis pas végane et respecte les choix de chacun. Je ne respecte pas la violence comme on a pu le voir dans les abattoirs. Il faut que les choses soient faites dans le respect et il y a plein d’industries du cuir qui font les choses bien. Il faut le dire.
Travailler et distribuer différemment. Chez Headoniste, on a numéroté les casquettes et on ne fait que des séries limitées. Une fois qu’il n’y en a plus, c’est fini, on passe à autre chose.
On est encore en pleine pandémie et on fonctionne encore différemment. Peut-être que dans 2 ans on reviendra à nos vieux démons. Je ne sais pas. Mais je pense qu’on est amené à travailler différemment et à faire les choses de manière plus respectueuse. Cela dépend des produits aussi. En Chine il y a de très beaux savoir-faire. En maille par exemple, ils ont de très belles laines. Il y a des entreprises familiales qui respectent l’environnement. Dans le monde la machine s’est mise en route. Il y a de partout, même en France des entreprises qui ne respectent pas l’environnement. Il faut surtout éduquer le consommateur.

Où distribuez-vous vos produits et comment communiquez-vous ?

Par choix, on est parti sur une distribution sur internet car les produits Made in France ont un certain prix, le coût horaire en France dans l’industrie textile est assez cher, environ 30 €/H et même si je fais 10 000 pièces, le coût horaire ne va pas changer. C’est normal, chaque personne doit pouvoir gagner sa vie. En fabriquant, je vais pouvoir gagner un petit peu sur la matière première. Avec des plus grosses quantités, on gagne un peu sur l’organisation, la mutualisation ce qui fait qu’on va baisser légèrement le coût, mais pas tant que ça. Mon prix de revient est donc élevé et si je distribuais mes produits en magasin, les marges sont telles que j’aurais un produit trop cher et j’estimais qu’on pouvait être premium sans basculer dans des prix trop élevés par rapport à la fabrication française. C’est pour cela qu’on est resté sur internet avec des marges très raisonnables.
Vous pouvez trouver la marque sur internet mais aussi en pop-up stores où je suis présente en magasin sur des périodes données. Pour le concept store d’Antoine Dénériaz, c’est différent. On fait un partenariat avec lui ce qui nous permet d’avoir une visibilité sur les boutiques de luxe de toutes les stations de ski. Le but n’est pas de promouvoir nos propres produits mais de développer des collections personnalisées pour ses boutiques de luxe, avec des produits plus spécifiques puisque je commence à produire à 24 pièces. C’est donc se faire connaitre pour faire des partenariats et ensuite faire leurs propres gammes de produits.
Notre marque reste essentiellement sur internet et pop-up stores. C’est une manière assez moderne de distribuer. On communique beaucoup sur les réseaux sociaux, Instagram et Facebook notamment. Le bouche à oreille me permet aussi de bien vendre. Quand les gens voient notre produit, ils comprennent le prix, ce qui fait fonctionner une sorte de microcosme. Je rencontre des personnes et se créent des partenariats comme pour les bijoux où on a rencontré Noël Jalabert qui a créé les Fontes de Mars. Il connait une personne qui en connait une autre, … On s’est fait connaitre comme ça, de bouche à oreille et je trouve que c’est plutôt bien même si c’est plus long.
Avoir une boutique ça coute cher. Ce que j’aimerais plus tard, ce serait un lieu qui fasse boutique, showroom, bureau où on rencontre des personnes, mais pas une boutique qui ne fasse que de la vente. On n’est pas voué à distribuer en magasin parce que dans ce cas mes prix seront de 200 €, ce que je trouve cher et je trouverais dommage de ne pas faire connaitre les savoir-faire français à une majorité de personnes parce que le prix de vente est un frein.

En conclusion ?

C’est une belle aventure et quand on a la possibilité de le faire, il faut le faire. Ce n’est pas de tout repos mais c’est très satisfaisant : on voit les choses évoluer et avancer. Il faut s’accrocher à ses croyances. On peut faire des choses engagées même si ce n’est pas toujours facile.


Si comme Véronique Boute vous souhaitez créer votre marque de mode ou d’accessoires, la formation Manager de l’Offre produit Textile-Mode-Cuir vous y prépare. Contactez-moi pour un RDV : kseigneret@albertdemun.net

Karine Seigneret